Une fois n'est pas coutume, je vais vous parler aujourd'hui
d'un ancêtre corrézien de mon mari. De son grand-père paternel.
Portrait de Léonard Chadal, Archives personnelles |
Nous sommes à Uzerche, le 24 août 1916, alors que la
guerre fait rage tout au long des tranchées qui barrent le nord de la France,
de la Meuse à la Somme.
Dans l'étude de Maître Laborie, remplacé par le vieux Maître
Breuil pour la durée de la guerre, Léonard Chadal, vingt-neuf ans, est
accompagné de sa jeune épouse, qui vient d'avoir dix-neuf ans. Il bénéficie
d'une permission et il la met à profit pour préserver les intérêts de sa femme
par une donation, dont voici l'essentiel :
"Lequel a déclaré
faire donation entre vifs pour le cas où elle lui survivrait à Mad. Foujanet,
son épouse, sans profession, demeurant actuellement au Puy de la Brune, commune
de Saint-Ybard à ce présente et qui accepte sous son autorisation de
l'universalité de tous les biens meubles et immeubles qui composeront sa
succession au moment de son décès…"
Le mois précédent, Léonard Chadal a participé à l'offensive
sur le front de la Somme. Blessé à la tête le 1er juillet à
Becquincourt, trépané, évacué le 11 juillet, il quitte l'hôpital de
Bergues le 20 août avec une permission de sept jours. Juste le temps de
traverser plus de la moitié de la France et de retrouver son épouse Anna à sept
cents kilomètres de là, en Corrèze. Le couple s'y était marié le
17 février 1914, à Salon-la-Tour précisément.
Auparavant, Léonard avait rempli ses obligations militaires
en effectuant deux ans de service dans l'armée active, d'octobre 1908 à
septembre 1910. Puis il avait repris son métier de maçon sur les chantiers des
beaux quartiers parisiens.
On imagine facilement les pensées qui hantent Léonard, au
moment de signer l'acte notarié. Il a été mobilisé le 12 août 1914, six
mois à peine après son mariage. Deux ans déjà se sont écoulés depuis qu'il a
endossé à nouveau l'uniforme. Son frère Louis, de cinq ans son cadet, a été tué
à l'ennemi l'année précédente, le 6 octobre 1915, alors qu'il allait avoir
vingt-trois ans.
L'avenir doit lui paraître bien sombre. C'est la raison,
sans doute, de cette donation au cas où…
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