Je continue à explorer virtuellement le Haut-Maine et,
quittant Chantrigné, je fais un détour par Montreuil-Poulay pour y chercher le
deuxième mariage d'un de mes ancêtres à la neuvième génération.
Et, dès les premières pages du registre, je tombe sur ce
document :
AD Mayenne BMS Montreuil-Poulay 1674-1715 E dépôt 118/E1 vue 2/204 |
Caterine Cousin faict dire que les meubles tant morts
que vifs au lieu de la Nocherie paroisse de Monstreuil sont
à vendre mardy prochain au plus offrant et dernier
enchérisseur ceux qui voudront s'y rendre jeudy seront
receus moyennant leur enchère"
que vifs au lieu de la Nocherie paroisse de Monstreuil sont
à vendre mardy prochain au plus offrant et dernier
enchérisseur ceux qui voudront s'y rendre jeudy seront
receus moyennant leur enchère"
Il s'agit manifestement d'une paperole glissée dans le
registre avec deux ou trois autres. Pas de date, pas de signature, je ne suis
même pas capable de dire si elle est de la main du curé. Mais j'ai tendance à
penser qu'elle était destinée à être lue au prône de la messe paroissiale, pour
informer les personnes intéressées. La dernière phrase me laisse perplexe,
quelqu'un peut m'éclairer ?(2)
Tutelle et curatelle
Profitons-en pour clarifier nos idées sur la tutelle et la
curatelle, grâce au Dictionnaire de l'Ancien Régime(1).
De quoi s'agit-il ? de mesures de protection des enfants mineurs orphelins
de père. La pratique en était relativement courante, dans la mesure où la durée
moyenne du mariage était courte, compte tenu de la mortalité élevée.
Il s'agit de confier à un tuteur qui représente l'enfant la
gestion des intérêts et des biens de ce dernier. La tutelle peut être attribuée
à la mère, si elle survit à son époux, tant qu'elle n'est pas remariée. Sinon,
elle est généralement confiée au plus proche parent masculin, un frère majeur
ou un oncle. Elle dure jusqu'à la puberté du pupille (douze ans pour les filles
et quatorze ans pour les garçons, âge à partir duquel un mariage est valide
selon le droit canon).
Elle est ensuite relayée par la curatelle,
c'est-à-dire l'assistance du mineur pour les actes juridiques importants, et ce
jusqu'à sa majorité (vingt-cinq ans, sous l'Ancien Régime).
Inutile de préciser que ces mesures de protection
patrimoniale donnent lieu à la production de nombreux documents :
inventaires après décès, comptes de tutelle… et contentieux, si le tuteur s'est
montré indélicat. Une mine pour les généalogistes.
Si les enfants de Jean Guiller et de Catherine Cousin sont
pourvus d'un curateur, c'est qu'ils ont donc atteint la puberté, mais ne sont
pas encore majeurs.
Meubles morts et
meubles vifs
Comme leur nom l'indique, les biens meubles s'opposent aux
biens immeubles qui, eux, ne peuvent être déplacés (terrains, bâtiments…). Les meubles
morts se rapportent aux meubles meublants (lits, tables, chaises, coffres, armoires,
tapisseries, vaisselle et autres objets de cette nature), mais sans doute aussi
aux outils ou aux charrettes, par exemple.
Pour leur part, les meubles vifs désignent tout
simplement le bétail. N'oublions pas que nous sommes à une époque où le monde rural
prédomine et où le seul mode de traction est encore animal.
Ces trouvailles dans les registres nous donnent ainsi l'occasion
de réviser quelques notions de droit privé.
(1) Dictionnaire de l'Ancien Régime, Royaume
de France XVIe-XVIIIe siècle, publié sous la direction de Lucien Bély,
Presses Universitaires de France, collection Quadrige Dicos Poche, 3e
édition 2e tirage août 2013, 1408 pages
(2) Grâce à des commentaires de personnes plus douées que moi en paléographie, il faut lire : "ceux qui voudront s'y trever ils y seront receus moyennant leur enchère" et non pas "ceux qui voudront s'y rendre jeudy…", ce qui ne voulait strictement rien dire !
(2) Grâce à des commentaires de personnes plus douées que moi en paléographie, il faut lire : "ceux qui voudront s'y trever ils y seront receus moyennant leur enchère" et non pas "ceux qui voudront s'y rendre jeudy…", ce qui ne voulait strictement rien dire !