lundi 16 juin 2014

N comme nourritures terrestres

Parmi les papiers de famille dont je suis dépositaire, figurent une dizaine de menus de fête, certains datés et d'autres non, mais tous surprenants si je les compare aux pratiques actuelles.

Je n'ai aucune indication précise sur les circonstances pour lesquelles ils ont été rédigés, mais je puis avancer quelques hypothèses sans grand risque de me tromper.



Le premier menu est daté du 7 octobre 1900. Un dimanche. J'en ai trois exemplaires, le premier au nom de "mademoiselle Julia Fourcade", un autre au nom de sa tante du côté maternel et le troisième au nom de sa future belle-sœur. J'en conclus qu'il s'agit vraisemblablement du repas de fiançailles de ma grand-mère. Une main anonyme a pris soin de rédiger les menus et de les illustrer avec un motif différent pour chaque convive. Le repas se termine par un "café Bagatelle-Park", qui semble indiquer que les festivités ont lieu dans la propriété familiale.

Julia vient de rentrer de son escapade parisienne avec son père, un voyage qui a donné lieu à des échanges épistolaires avec Maurice, déjà évoqués dans un précédent billet. Le mariage sera célébré sept semaines plus tard. Les circonstances sont suffisamment exceptionnelles à ses yeux pour que ma grand-mère ait gardé ces cartons à travers les décennies.

Les trois menus suivants sont datés de 1929 : respectivement le dimanche 29 septembre, le lundi 18 novembre et le mardi 19. À coup sûr, les fiançailles, le mariage civil et le mariage religieux de la fille aînée de Julia, Suzanne. Le carton du 19 novembre, à l'enseigne du Grand Hôtel à Pau, est orné d'un monogramme bleu et or, un M et un G entrelacés, les initiales des patronymes des deux époux.

Un dernier menu est daté du 10 décembre 1939. À nouveau un dimanche. À n'en pas douter, les fiançailles de mes parents, qui se sont rencontrés pour la première fois deux mois plus tôt et se marieront le mois suivant. Le bristol bleu est plus sobre, les temps ont changé.

D'autres cartons, au nom de "M. Maurice Maitreau", "Monsieur Maitreau", "Madame Maitreau", ne comportent malheureusement aucune date. Leur graphisme les situerait pour l'un à la Belle Époque et pour les autres durant l'entre-deux-guerres, mais je n'en sais pas plus.

Ces repas de fête comportent tous un nombre impressionnant de services : au moins six, et jusqu'à dix pour le plus impressionnant d'entre eux. Potage ou consommé, poisson ou crustacé, préparation en brioche ou en croûte, volaille, gibier, viande rôtie, légumes, salade, dessert glacé, petits fours, fruits et friandises… les lignes se succèdent sur les bristols et les mets dans les assiettes ! Seuls les fromages sont absents de ces agapes.

La liste des vins servis est à l'avenant, avec une nette prédominance des crus bordelais, sud-ouest oblige. Pas moins de quatre bordeaux blancs et de cinq bordeaux rouges, sans compter un Muscat de Samos et un champagne, pour les fiançailles de Suzanne en septembre 1929.

Je terminerai par une mention spéciale pour la bombe Nesselrode, servie lors de son mariage, quelques semaines plus tard : je lui trouve un parfum proustien ! Imaginez un dessert glacé à base de purée de marrons, de marasquin, de fruits confits et de crème anglaise…


Assiette du service Gascogne
Collection personnelle

3 commentaires:

  1. A manger tout cela, je meurs sur place! surtout en 1900 avec leurs corsets, comment elles faisaient ! Il me plairait aussi de savoir ce qu'est "un gateau misérable" ? super light pour compenser ? !!!
    bon appétit
    selma cayol

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    1. Je n'ai pas la recette, hélas, mais je me suis fait la même réflexion.

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  2. J'ai eu la même réaction que Selma, je ne pourrais pas manger tout cela, les repas devaient durer des heures avec des pauses entre les plats pour que cela soit possible, non ?

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