jeudi 5 juin 2014

E comme Exposition universelle de 1900

Fin septembre 1900 : environ deux mois avant son mariage, ma grand-mère, dix-huit ans, était en voyage à Paris en compagnie de son père. Je n'ai aucun autre élément sur ce séjour dans la capitale que les deux lettres envoyées par son fiancé.

Cependant, je ne crains pas d'affirmer que Théodore Fourcade et sa fille Julia visitèrent l'Exposition universelle. Comment aurait-il pu en être autrement ? Ils descendirent d'ailleurs dans un premier temps à l'hôtel Lommé, situé au n°72 du boulevard de Grenelle, à quelques centaines de mètres du Champ-de-Mars, ce qui vient renforcer ma conviction.

Archives personnelles

L'exposition avait ouvert ses portes à la mi-avril et fermerait à la mi-novembre, drainant 50 (cinquante !) millions de visiteurs durant ces sept mois, surclassant haut la main la fréquentation des précédentes expositions.

La manifestation occupait plus d'une centaine d'hectares des deux côtés de la Seine, entre l'ancien Trocadéro et la Concorde sur la rive droite, le Champ-de-Mars et l'esplanade des Invalides sur la rive gauche. Plus une centaine d'hectares également, au Bois de Vincennes, pour les manifestations sportives et la présentation des produits les plus volumineux (comme les locomotives proposées à l'admiration des curieux par plusieurs compagnies de chemins de fer).

Le plan édité par L. Baschet pour l'occasion dessine un long ruban de pavillons édifiés dans les quartiers ouest de la capitale, sur les deux rives du fleuve.

Plan de l'Exposition, source Wikimedia Commons

Les bâtiments des exposants étaient organisés selon plusieurs thèmes, que le Guide pratique du visiteur de Paris et de l'Exposition(1) nous résume ainsi :
  • La Ville des Arts,
  • Cosmopolis (pavillons des Puissances étrangères),
  • La Ville de Paris (Ecoles, Services publics, serres et attractions),
  • La Ville militaire et maritime,
  • La Ville industrielle,
  • La Ville exotique (temples, dômes et minarets).

 Il était tout à fait impossible de tout voir, même si l'Exposition était ouverte aux visiteurs de 8h du matin à 11h du soir, pour un tarif variable suivant les heures et les jours. Le ticket valait un franc, mais il en fallait parfois deux pour franchir les tourniquets. Et payer encore pour accéder à diverses commodités.

 Plusieurs moyens étaient prévus pour faciliter la circulation : trottoirs roulants à deux vitesses, chemin de fer électrique à contresens de ces fameux trottoirs roulants, rampes mobiles pour accéder à l'étage des pavillons construits sur plusieurs niveaux, passerelles métalliques enjambant la Seine et doublant les ponts d'Iéna, de l'Alma et des Invalides… mais comment choisir parmi la multitude des thèmes proposés par les dizaines de milliers d'exposants ?

Le Guide pratique déjà cité suggère un itinéraire,  tout à fait irréalisable en une seule journée :
  • Entrer par la porte monumentale de la Concorde, visiter les deux palais des Beaux-Arts construits pour l'occasion, le Grand et le Petit Palais, de part et d'autre d'une avenue qui s'appelait à l'époque l'avenue Nicolas II,
  • Emprunter le pont Alexandre III récemment inauguré, visiter les pavillons installés sur l'esplanade des Invalides et suivre le quai jusqu'au pont des Invalides,
  • Revenir sur la rive droite et découvrir divers pavillons des Puissances étrangères,
  • Retraverser la Seine au pont de l'Alma, se diriger vers le Champ-de-Mars et la tour Eiffel,
  • Enfin regagner la rive droite par le pont d'Iéna et visiter la section coloniale de part et d'autre du Trocadéro…


Sans oublier au passage d'apprécier la simulation d'un voyage en ballon à travers l'Europe et l'Afrique (cinéorama), celle d'un voyage en bateau à travers la Méditerranée (maréorama) et de d'apprendre des rudiments d'astronomie à l'intérieur d'un globe céleste de 46 mètres de diamètre !

Le Guide pratique du visiteur de Paris et de l'Exposition, édité par Hachette, dans lequel j'ai puisé ces informations, est un épais volume de plus de cinq cents pages, avec cartes, plans, tableaux et illustrations, annexes, encarts publicitaires et bons de réduction pour les attractions, les restaurants et les spectacles.

Il est tout à fait représentatif de l'inébranlable foi dans le progrès qui prévalait à l'époque. J'en veux pour preuve cette phrase relevée dans ses pages : "C'est l'exposition d'un grand siècle qui finit en ouvrant une ère nouvelle dans l'histoire de l'humanité."

J'imagine sans peine que ma grand-mère regagna son Béarn natal avec suffisamment de souvenirs pour alimenter les conversations pendant plusieurs mois.

6 commentaires:

  1. Bonjour
    Nous avons eu la même inspiration pour cette lettre E. J'avais moi aussi des ancêtres à l'Expo 1900, quelques cartes et plans en témoignaient. Mais votre article est plus complet sur la disposition et les activités proposées.
    Je suis une nouvelle bloggeuse, et j'avais repéré votre site comme étant bien intéressant.

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    1. Merci. Le même thème, avec des points de vue différents, c'est toujours très intéressant.

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  2. Pour moi, l'exposition universelle, cela a été - aussi - l'occasion de demander aux instituteurs de rédiger une monographie sur leur commune. J'en ai retrouvé plusieurs, qui donnent bien le cadre de vie de nos ancêtres à cette époque...

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  3. Ça devait être quelque chose quand même cette exposition universelle. Je ne sais même pas si mes ancêtres contemporains de cette époque en ont entendu parler.

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    1. C'était incontournable, comme on dirait aujourd'hui. Cinquante millions de visiteurs, quand même !

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  4. Autre génération autre exposition ! des trésors cachés dans les archives de la famille de mon mari ! Le reflet d'une époque http://memoirevive-coteblog.blogspot.fr/2012/05/lexposition-internationale-de-1937.html

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