lundi 13 juillet 2015

Des ancêtres qui donnent du fil à retordre

J'ai entamé la semaine dernière des recherches sur une branche que j'avais quelque peu délaissée jusqu'à présent, mes ancêtres des Landes. Landais ? Du moins le croyais-je. J'ai tiré un brin de fil et j'ai dévidé toute une pelote !

Le point de départ

Tout commence avec Marie Ollé : "née le quinze nivôse sixième année républicaine à Dax suivant l'extrait de naissance à nous remis, fille mineure de Jean Ollé marchand et de Marie Menou", nous dit l'acte de mariage rédigé par le maire d'Aucun (Hautes-Pyrénées). Le 31 décembre 1807, elle épouse Jean Louis Fourcade dans ce village situé au pied du col du Soulor. L'un des mes ancêtres à la sixième génération (Sosa 56). Il a vingt-quatre ans et il est cultivateur dans un modeste village de montagne, elle a dix-neuf ans et vient d'une ville située à plus de cent cinquante kilomètres de là ; comment se sont-ils rencontrés ? Mystère !

Maisons anciennes à Aucun, collection personnelle

 Marie décèdera à Saint-Pé-de-Bigorre en 1849, si j'en crois l'acte de mariage de son fils Gabriel, mais les Hautes-Pyrénées figurent parmi les rares départements dont l'état civil n'est toujours pas accessible en ligne. Armons-nous de patience et, en attendant, allons voir de quoi il retourne dans les registres des Landes.

Les recherches dans l'état civil de Dax

Munie d'une date de naissance et d'un lieu précis, je n'ai pas trop de peine à reconstituer la famille de Marie Ollé, à un détail près : l'identité de la mère…

Je trouve en effet le mariage de Jean Peyou, marchand colporteur, et de Magdelaine Dumont, le 17 mai 1795 à Dax. Peyou ou Ollé ? Rien à voir, me direz-vous. Détrompez-vous, une mention en marge l'acte de naissance de leur premier enfant, Jean Pierre, né le 19 mai 1796 (je vous fais grâce du calendrier républicain), indique clairement que Jean Ollé, qui signe ainsi tous les actes de naissance de ses enfants, et Jean "dit de Peyou" ne sont bien qu'une seule et même personne. Et que Magdelaine Dumont est "dite Couroulo". Certes, mais non pas Marie Menou… allons, bon.

Mon ancêtre Marie Ollé a vu le jour une vingtaine de mois plus tard, le 4 janvier 1798, le fameux 15 nivôse an VI dont il était question plus haut. Son père est bien Jean Ollé, seule l'identité de sa mère, Marie Menou ou Magdelaine Dumont, pose problème.

Viennent ensuite une autre Marie en avril 1799, une petite Jeanne en mai 1800, un certain Laurent en mars 1803 et une dernière petite Marie en avril 1806, qui ne vivra que cinq jours. Tous ces enfants sont issus du couple formé par Jean Ollé (même si l'orthographe du patronyme diffère suivant la fantaisie des agents municipaux) et Magdelaine Couroulo. Cette dernière décède le 20 avril 1806, trois jours après la naissance de sa dernière fille.

J'aurais tendance à penser, sans en être tout à fait sûre, que Marie Menou et Magdelaine Dumont dite Couroulo pourraient bien être une seule et même personne : dans l'acte de mariage, l'un des témoins s'appelait Jean Menou et il était identifié comme étant un oncle de Magdelaine Dumont. Alors, confusion de l'officier de l'état civil en cette période troublée de la Révolution ? Pourquoi pas ? Affaire en suspens, pour l'instant, car Magdelaine Dumont semble originaire de Bagnères-de-Bigorre, toujours dans les Hautes-Pyrénées.

Jean Peyou ou Ollé, devenu veuf, se remarie le 21 janvier 1808 avec une certaine Marie Cazeils, également veuve, originaire de Montfort-en-Chalosse, âgée de quarante-six ans, tout comme lui. Ils n'auront apparemment pas d'enfant ensemble, mais la fille de l'un épousera le fils de l'autre ! Ils vivront tous deux fort longtemps : Jean jusqu'à l'âge de quatre-vingt-deux ans et son épouse Marie jusqu'à quatre-vingt-onze ans révolus. La cuisine du sud-ouest est réputée pour favoriser la longévité, dit-on…

Les recherches dans les registres paroissiaux d'Urdès

Ce second acte de mariage est intéressant, dans la mesure où il prodigue moult détails sur l'origine de Jean Peyou ou Ollé et sur l'identité de ses parents. Nous voilà donc partis vers Urdès, village de moins de trois cents habitants, aujourd'hui comme au temps de la Révolution. Nous sommes dans le Béarn, entre Artix et Arthez-de-Béarn, à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Pau.

Les parents de Jean Ollé s'y sont mariés en 1756 :

"L'an 1756 et le dix et huit février receurent la bénédiction
nuptiale Jean Pierre d'Ollé parroisse de Montmorain
diocèze de Commenges, et Jeanne de Cap ditte de Fardet
native et habitante du lieu d'Urdez…
"

Ne vous méprenez pas sur l'usage de la particule, elle indique simplement l'appartenance à une maison, notion capitale dans toute la région pyrénéenne. J'y reviendrai après.

J'ai identifié quatre enfants issus du couple : Bernard en février 1757, Jeanne en mai 1759, notre fameux Jean déjà évoqué plus haut, né le 31 décembre 1761 et baptisé le 1er janvier 1762 (ici, clin d'œil appuyé à un de mes cousins, qui se reconnaîtra) et enfin une autre Jeanne onze ans plus tard, le 31 décembre 1772, ultime accouchement qui sera fatal à la mère, décédée deux jours après.

L'acte de décès du père nous éclaire un peu plus sur ces patronymes qui semblent varier comme girouette au gré du vent. Lorsqu'il rend son dernier souffle le 14 juillet 1803 (25 messidor an XI), l'acte indique :

"Jean Pierre Ollé dit Peyou proffession de
cordier, décédé le jour d'avant hier vingt et cinq du courant
vers les onze heures du soir, agé de huitante ans né en la commune
de Montmorin maison de Ollé, département de Haute Garonne
demeurant maison de Ollé dit Peyou de la commune d'Urdès,
arrondissement d'Arthès
…"

Je note au passage qu'il me faudra également exploiter les archives de Haute-Garonne. Le village de Montmaurin, suivant l'orthographe admise aujourd'hui, se situe à quelques lieues au nord-ouest de Saint-Gaudens. Non loin de Cassagnabère-Tournas, dont est originaire la branche Adema de ma famille, et non loin d'Aulon, dont est originaire la branche Artigues. Malheureusement, pas de registre en ligne avant 1773 pour la paroisse de Montmaurin, alors que Jean Pierre Ollé dit Peyou a vu le jour vers 1723 !

D'après l'onglet Migrations dans Heredis 2015

Partis des Hautes-Pyrénées vers les Landes et la Chalosse, nous voici maintenant en Haute-Garonne, après un passage dans les Pyrénées-Atlantiques, côté Béarn. Décidément, mes ancêtres aimaient arpenter les chemins, tout au long de la chaîne pyrénéenne chère à ma grand-mère maternelle.

Les "maisons" pyrénéennes

Mais attardons-nous un instant sur cette notion de "maison" évoquée plus haut. Il y a plus de trois ans, j'avais eu l'heureuse idée de télécharger le texte d'une conférence donnée le 2 octobre 2004 à Toulouse par Michel Sauvée, dans le cadre des journées nationales de généalogie de l'Entraide généalogique du Midi toulousain. J'y relève cette phrase introductive :

"Si dans le reste de la France, les hommes donnent un nom à leur maison, dans la société pyrénéenne, c'est la maison qui impose son nom aux hommes."

J'y apprends que, selon une coutume en vigueur dans les régions du Comminges, des Quatre Vallées, de la Bigorre, du Béarn et du Pays basque, la maison en tant que patrimoine familial, avec les biens fonciers qui y étaient attachés, était dévolue à un seul enfant du couple, en principe l'aîné, garçon ou fille. J'ai d'ailleurs constaté, à ma grande surprise, que cette pratique subsiste encore aujourd'hui, ce qui complique quelque peu les successions et suscite parfois des querelles familiales entre partisans de l'ancien usage  et tenants de l'actuel code civil.

Le nom de la maison, unique au sein du village, ne changeait pas. Il était ajouté au patronyme de tous ceux qui y demeuraient : parents détenteurs du patrimoine, couple qui leur succédait (y compris, selon les cas, le gendre ou la bru), enfants du couple, ainsi que les oncles, tantes, frères et sœurs célibataires tant qu'ils y demeuraient. Ce qui apparaît clairement à la lecture des registres ; il suffit de feuilleter quelques pages dans les registres d'Urdès, par exemple, pour relever les appellations suivantes : Dabadie dit Peyré, Toulouzaa dit Rey, Capdevielle dit Hausot, Loustalot dit Caplaing, et ainsi de suite.

Vous imaginez la difficulté pour le généalogiste amateur ? Il y a largement de quoi perdre le fil d'une génération à l'autre… ou encourager des vocations de détective.

2 commentaires:

  1. j'ai donc découvert le sens particulier des "maisons pyrénéennes"
    dur à gérer !!!
    Fanny-Nésida

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    1. Oui, plutôt compliqué, avec des variantes d'une génération à l'autre… pour l'instant, j'ai un peu de mal.

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