Sur la première, un cortège composé de civils et de
militaires marche au milieu de la chaussée, entre deux haies de spectateurs,
laissant derrière lui un pont et s'apprêtant à passer devant un bâtiment sur
lequel je distingue le mot "Postes". C'est sans doute la belle
saison : les spectatrices arborent des tenues claires et j'aperçois au
moins un canotier. Vu la longueur des jupes et les chapeaux-cloches qui
enserrent la tête des femmes, je dirais que nous sommes dans cette période de
la Troisième République qui fut surnommée les Années folles.
Collection personnelle |
Sur la deuxième photo, un petit groupe d'hommes se tient
debout dans un jardin public, au pied d'un monument aux morts où une gerbe de
fleurs a été déposée. Dans la foule qui fait cercle autour d'eux, je distingue
une fanfare, des militaires au garde-à-vous, des drapeaux, des hommes en
redingote tête nue, quelques costumes clairs et quelques canotiers…
Collection personnelle |
Le verso m'en apprend davantage. Toutes deux portent un
tampon : "L'Actualité",
Jové, photographe, 46, rue du Maréchal Joffre, Pau(1).
Et cette précieuse indication manuscrite : Doumergue Président de la République française, Gabe maire, papa
adjoint, ainsi qu'une signature, celle d'une de mes tantes, Jacqueline
Maitreau, dont je reconnais l'écriture.
Collection personnelle |
Précieux indices qui me permettent d'abord de situer la
scène. Amédée Gabe a été maire d'Oloron-Sainte-Marie après la guerre de
1914-1918, de novembre 1919 jusqu'à son décès en octobre 1932. Un
petit tour sur internet, histoire de vérifier que ce monument aux morts en
forme de colonne, dont on distingue surtout le socle, le reste se perdant dans
les frondaisons, est bien celui de la sous-préfecture des Pyrénées-Atlantiques.
Gaston Doumergue, quant à lui, a été Président de la
République de 1924 à 1931, ce qui permet d'affiner la datation de l'événement.
Je pencherais pour le mois de juillet 1928. Pourquoi, me direz-vous ? Eh
bien, précisément le 18 juillet de cette année-là, le Président de la
République Gaston Doumergue et le roi d'Espagne Alphonse XIII inauguraient
la gare internationale de Canfranc(2) ;
laquelle est située à la frontière entre la France et l'Espagne, à une
soixantaine de kilomètres au sud d'Oloron, sur la ligne de chemin de fer qui reliait
Pau à Saragosse, en passant par le tunnel du Somport.
De là à penser que le Président de l'époque en a profité
pour rendre visite à la cité béarnaise il n'y a qu'un pas que je franchis
allégrement. Il faudrait néanmoins vérifier en consultant la presse locale…
Conclusion : mon grand-père maternel Maurice Maitreau,
dont je crois reconnaître la silhouette sur la première photo, a donc fait partie
du conseil municipal d'Oloron-Sainte-Marie durant l'entre-deux-guerres. J'ai
profité d'une escapade dans le sud-ouest pour tenter d'en apprendre davantage…
rendez-vous lundi prochain pour connaître la suite !
(1) Jean Jové (1876-1957), photographe d'origine espagnole, naturalisé français en
1931, installé successivement à Epinal, à Châteauroux, à Limoges, puis à Pau à
partir de 1920 (source Wikipédia).
(2) Deuxième plus grande gare d'Europe par la taille de ses installations, après
celle de Leipzig, mais aujourd'hui désaffectée, après de multiples vicissitudes
(crise de 1929, incendie en 1931, guerre civile espagnole…).
Jean JOVE fut durant de nombreuses années le photographe "attitré" de mon père,le peintre René Marie CASTAING, Grand Prix de Rome de Peinture 1924, qui appréciait énormément la qualité artistique de son travail et la valeur de ses critiques ainsi d'ailleurs que celles de son épouse, qui après la mort de l'artiste publia un très belle article dans le"PATRIOTE des PYRENEES"
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