lundi 26 janvier 2015

Ce n'est pas une épine, c'est un buisson de ronces !

Le couple formé par Pierre Letourneau et Marie Chardron a eu trois enfants, Pierre, Christophe et enfin Philibert, mon ancêtre à la sixième génération (Sosa 42).

Collection personnelle
Un seul hic : où et quand se sont-ils mariés ? Ce n'est pas une épine généalogique, c'est un buisson de ronces ! Jugez-en plutôt.

Les faits connus

Le 2 mai 1794, à Meslay-du-Maine, dans le département de la Mayenne, Pierre Letourneau se présente à la maison commune, en compagnie de Philibert Chardron, son beau-père, et d'un autre témoin pour déclarer que "Perrine Chardron son épouse en légitime mariage est accouchée ce matin en sa maison dans le bourg d'un enfant mâle auquel ils ont donné le prénom de Pierre".

Je dis bien "Perrine" et non "Marie".

L'année suivante, plus précisément le 7 juin 1795, le même Pierre Letourneau se présente à nouveau devant le même officier public, Nicolas Buffard, pour déclarer la naissance de Christophe. Le personnage en question nomme d'abord la mère "Perrine", mais biffe aussitôt le prénom et le remplace par "Marie". L'enfant ne vivra qu'une quinzaine de jours à peine.

Le 24 février 1796, Charles Ravault et Christophe Raillou entrent à leur tour dans la maison commune et déclarent que "Pierre L'Etourneau époux de Marie Chardron a été tué par les Chouans sur la place dans le bourg âgé de vingt cinq ans ou environ". La veille au soir (ou bien était-ce simultanément, ce n'est pas clair), un marchand tissier et une femme âgée de soixante-huit ans ont subi le même sort.

Le 1er août 1796, soit cinq mois plus tard, Louis Guillet, Perrine Chardron et Françoise Bouvier viennent déclarer que "Marie Chardron épouse en légitime mariage de défunt Pierre L'Etourneau est accouchée de ce matin d'un enfant mâle auquel ils ont donné le prénom de Philibert".

Enfin, le 2 juillet 1798, un dernier acte vient clore la brève histoire du couple : "Marie Chardron veuve de feu Pierre Letourneau, fille de Philbert Chardron marchand et de Marie Briceau… est morte de ce jourd'huy à trois heures du matin, âgée de vingt-neuf ans, née à Meslay".

Les premières recherches

J'ai facilement trouvé les actes de baptême de Marie Chardron et de sa sœur Perrine, nées respectivement en décembre 1769 et juin 1771 à Meslay-du-Maine, ainsi que ceux de leurs sept frères et sœurs. Ils sont presque tous agrémentés du paraphe de leur père, qui signe tantôt "Philberth Chardron", tantôt "Ph. Chardron" d'une main assurée.


Trouvé également l'acte de mariage des parents, Philibert Chardron et Marie Briceau, en janvier 1769, toujours à Meslay-du-Maine.

Trouvé aussi l'acte de baptême d'un certain Pierre Marin Le Tourneau en la paroisse Saint-Jean-Baptiste de Château-Gontier, le 11 février 1770. Mais aucun acte de mariage de ce dernier, ni avec Marie, ni avec Perrine Chardron, ni à Meslay-du-Maine, ni à Château-Gontier.

Les mariages des deux fils Letourneau, Pierre et Philibert, à Château-Gontier, le premier en mars 1818 et le second en novembre 1822, ajoutent encore à la confusion. Pierre est dit "fils majeur de Pierre Letourneau, tisserand, décédé au dit Meslay, le vingt-quatre février 1796… et de Perrine Chardron, son épouse, décédée au dit Meslay le quatorze messidor, l'an six(1)". L'acte de mariage de Philibert reprend exactement les mêmes termes, à un prénom près : cette fois, la mère s'appelle… Marie !

Décourageant !

Nouvelles investigations

À quelque temps de là, je pense enfin à pousser plus loin les recherches sur cette fameuse Perrine et je découvre que, le 29 mai 1799, elle a épousé un certain Jacques Laurent. Rien dans la rédaction de l'acte de mariage ne permet de penser qu'elle est veuve de Pierre Letourneau…

J'acquiers donc plus ou moins la certitude que les trois garçons sont issus du couple formé par Pierre Letourneau et Marie Chardron, parents tous deux décédés avant leur trentième année ; mais il me faudra sans doute me rendre aux Archives départementales de la Mayenne et consulter les tables des successions et absences pour en avoir le cœur net.

En reprenant le dossier ces jours-ci, me voilà soudain saisie d'un doute : en l'absence d'un acte de mariage indiquant précisément la filiation, comment être sûre de l'identité des parents de Pierre Letourneau ? J'ai noté qu'il était né à Château-Gontier, que ses parents s'appelaient René Isidore Letourneau et Marie Hamon, mais faites une recherche dans Geneanet, même en la limitant à la période entre 1750 et 1800, et vous obtenez plusieurs centaines de réponses ! Le patronyme Letourneau n'a rien de rare, le prénom Pierre pas davantage.

L'ai-je confondu avec un homonyme ? Je décide de relire, plus attentivement cette fois, les actes de mariage de ses deux fils, Pierre et Philibert.

Le mariage du jeune Pierre, tout d'abord. Parmi les témoins figure un certain Louis Etienne Hocdé, perruquier, vingt-sept ans, cousin germain de l'époux du côté paternel : me voilà confortée ; sa mère, Barbe Julienne Letourneau, et le père du marié sont bien frère et sœur.

Le mariage de Philibert, ensuite. Parmi les témoins figurent René Letourneau, propriétaire, soixante-six ans, et Yves Brette, tisserand, soixante-deux ans, oncles de l'époux du côté paternel. Le premier a les mêmes parents que le père du marié, le second a épousé une sœur du père du marié. Ouf ! la filiation de Pierre Letourneau, né à Château-Gontier en 1770, fils de René Isidore Letourneau et de Marie Hamon, est bien confirmée.

Mais où et quand s'est-il marié ? S'est-il d'ailleurs vraiment marié ou aurait-il profité des troubles de la période révolutionnaire pour le faire croire ? Je cherche encore la réponse.



(1) Soit le 2 juillet 1798. Pour faciliter la compréhension de la chronologie, j'ai converti toutes les dates du calendrier révolutionnaire en calendrier grégorien.

5 commentaires:

  1. Tu as regardé au chef lieu de canton ? j'aime bien ces généalogies où on mélange allégrement les prénoms, histoire de pimenter un peu les recherches :)

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  2. ces "fichues" années 1793-1794 dans l'ouest, difficile d'avoir un Etat Civil dans cette période ! Il me manque beaucoup d'actes de mariages et décès en Vendée dans ces 2 années ...

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  3. Pas facile de démêler tout ça ! Mais je suis étonnée et admirative en voyant tout ce que tu arrives à obtenir à la lecture et relecture des actes. Comme si tu pressais à nouveau un citron après en avoir bu tout le jus !

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  4. J'aime bien les jeux de logique et, parfois, la généalogie s'en approche.

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