Fin septembre 1900 : environ deux mois avant son
mariage, ma grand-mère, dix-huit ans, était en voyage à Paris en compagnie de
son père. Je n'ai aucun autre élément sur ce séjour dans la capitale que les
deux lettres envoyées par son fiancé.
Cependant, je ne crains pas d'affirmer que Théodore Fourcade
et sa fille Julia visitèrent l'Exposition universelle. Comment aurait-il pu en
être autrement ? Ils descendirent d'ailleurs dans un premier temps à
l'hôtel Lommé, situé au n°72 du boulevard de Grenelle, à quelques centaines de
mètres du Champ-de-Mars, ce qui vient renforcer ma conviction.
Archives personnelles |
L'exposition avait ouvert ses portes à la mi-avril et fermerait
à la mi-novembre, drainant 50 (cinquante !) millions de visiteurs
durant ces sept mois, surclassant haut la main la fréquentation des précédentes
expositions.
La manifestation occupait plus d'une centaine d'hectares des
deux côtés de la Seine, entre l'ancien Trocadéro et la Concorde sur la rive
droite, le Champ-de-Mars et l'esplanade des Invalides sur la rive gauche. Plus
une centaine d'hectares également, au Bois de Vincennes, pour les
manifestations sportives et la présentation des produits les plus volumineux (comme
les locomotives proposées à l'admiration des curieux par plusieurs compagnies
de chemins de fer).
Le plan édité par L. Baschet pour l'occasion dessine un long
ruban de pavillons édifiés dans les quartiers ouest de la capitale, sur les
deux rives du fleuve.
Plan de l'Exposition, source Wikimedia Commons |
Les bâtiments des exposants étaient organisés selon plusieurs
thèmes, que le Guide pratique du visiteur
de Paris et de l'Exposition(1) nous résume ainsi :
- La Ville des Arts,
- Cosmopolis (pavillons des Puissances étrangères),
- La Ville de Paris (Ecoles, Services publics, serres et attractions),
- La Ville militaire et maritime,
- La Ville industrielle,
- La Ville exotique (temples, dômes et minarets).
Plusieurs moyens
étaient prévus pour faciliter la circulation : trottoirs roulants à deux
vitesses, chemin de fer électrique à contresens de ces fameux trottoirs
roulants, rampes mobiles pour accéder à l'étage des pavillons construits sur
plusieurs niveaux, passerelles métalliques enjambant la Seine et doublant les
ponts d'Iéna, de l'Alma et des Invalides… mais comment choisir parmi la
multitude des thèmes proposés par les dizaines de milliers d'exposants ?
Le Guide pratique déjà
cité suggère un itinéraire, tout à fait irréalisable
en une seule journée :
- Entrer par la porte monumentale de la Concorde, visiter les deux palais des Beaux-Arts construits pour l'occasion, le Grand et le Petit Palais, de part et d'autre d'une avenue qui s'appelait à l'époque l'avenue Nicolas II,
- Emprunter le pont Alexandre III récemment inauguré, visiter les pavillons installés sur l'esplanade des Invalides et suivre le quai jusqu'au pont des Invalides,
- Revenir sur la rive droite et découvrir divers pavillons des Puissances étrangères,
- Retraverser la Seine au pont de l'Alma, se diriger vers le Champ-de-Mars et la tour Eiffel,
- Enfin regagner la rive droite par le pont d'Iéna et visiter la section coloniale de part et d'autre du Trocadéro…
Sans oublier au passage d'apprécier la simulation d'un
voyage en ballon à travers l'Europe et l'Afrique (cinéorama), celle d'un voyage
en bateau à travers la Méditerranée (maréorama) et de d'apprendre des rudiments
d'astronomie à l'intérieur d'un globe céleste de 46 mètres de
diamètre !
Le Guide pratique du
visiteur de Paris et de l'Exposition, édité par Hachette, dans lequel j'ai
puisé ces informations, est un épais volume de plus de cinq cents pages, avec
cartes, plans, tableaux et illustrations, annexes, encarts publicitaires et
bons de réduction pour les attractions, les restaurants et les spectacles.
Il est tout à fait représentatif de l'inébranlable foi dans
le progrès qui prévalait à l'époque. J'en veux pour preuve cette phrase relevée
dans ses pages : "C'est
l'exposition d'un grand siècle qui finit en ouvrant une ère nouvelle dans
l'histoire de l'humanité."
J'imagine sans peine que ma grand-mère regagna son Béarn
natal avec suffisamment de souvenirs pour alimenter les conversations pendant
plusieurs mois.
Bonjour
RépondreSupprimerNous avons eu la même inspiration pour cette lettre E. J'avais moi aussi des ancêtres à l'Expo 1900, quelques cartes et plans en témoignaient. Mais votre article est plus complet sur la disposition et les activités proposées.
Je suis une nouvelle bloggeuse, et j'avais repéré votre site comme étant bien intéressant.
Merci. Le même thème, avec des points de vue différents, c'est toujours très intéressant.
SupprimerPour moi, l'exposition universelle, cela a été - aussi - l'occasion de demander aux instituteurs de rédiger une monographie sur leur commune. J'en ai retrouvé plusieurs, qui donnent bien le cadre de vie de nos ancêtres à cette époque...
RépondreSupprimerÇa devait être quelque chose quand même cette exposition universelle. Je ne sais même pas si mes ancêtres contemporains de cette époque en ont entendu parler.
RépondreSupprimerC'était incontournable, comme on dirait aujourd'hui. Cinquante millions de visiteurs, quand même !
SupprimerAutre génération autre exposition ! des trésors cachés dans les archives de la famille de mon mari ! Le reflet d'une époque http://memoirevive-coteblog.blogspot.fr/2012/05/lexposition-internationale-de-1937.html
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