lundi 18 décembre 2017

Trêve des confiseurs

C'est bientôt Noël, puis la Saint-Sylvestre quelques jours plus tard…


En cette période propice à l'échange de cadeaux et de voeux, permettez-moi de vous souhaiter mille choses agréables, des échanges en famille et entre amis, de belles images et de passionnantes lectures, des découvertes inattendues, des surprises généalogiques, des voyages dans l'espace ou dans le temps, des rencontres entre cousins, enfin tout ce qui vous mettra d'humeur légère !

Quelques bulles de champagne peuvent naturellement faciliter cet état d'esprit. Et, bien sûr, rendez-vous l'année prochaine pour de nouvelles aventures…

lundi 11 décembre 2017

Avant la pause de Noël

L'heure est venue de jeter un œil sur les billets publiés depuis janvier sur ce blog : ils reflètent mon activité généalogique des douze derniers mois.

Collection personnelle

J'avais, par exemple, décidé en début d'année de centrer mes recherches sur les quatorze branches qui composent mes ancêtres à la cinquième génération : huit côté maternel, mais seulement six côté paternel (où les transformations sociales du XIXe siècle ont manifestement provoqué quelques naissances hors mariage).

Ce travail est loin d'être terminé, mais il m'a été très bénéfique. Consacrer plusieurs semaines à une même branche présente un avantage certain : l'écriture du vicaire ou du curé devient plus lisible au fil des pages, l'esprit se familiarise avec les patronymes et repère plus vite les personnages importants de chaque village, l'entourage familial se dessine avec les parrains et marraines, les oncles et les cousins, les témoins récurrents…

C'est ainsi qu'en janvier j'ai consulté les registres paroissiaux de la Lorraine à la recherche des François, avant de me tourner vers le Maine-et-Loire  pour les Maitreau en février et les Letourneau en mars. Les archives des Pyrénées-Atlantiques m'ont ensuite fourni quelques pistes sur les Déodat et leurs alliés les Loumède. Puis j'ai exploré avec bonheur les délibérations du conseil municipal d'Aucun (Hautes-Pyrénées), cherchant au détour de chaque page les traces de mon ancêtre Alexis Fourcade.

J'ai consacré ces dernières semaines à la Sologne et aux Laubret, grâce à l'indexation du recensement de 1906 sur Filae, qui m'a fourni quelques précieuses informations que je n'ai pas fini d'exploiter. De quoi fournir des thèmes de réflexion pour les premiers billets de l'an prochain, sans aucun doute.

Ces recherches par branche ont alimenté près de la moitié des articles de ce blog au cours de cette année 2017.

D'autres billets ont été consacrés aux documents que j'ai collectés lors de mes déplacements : la vente de la métairie des Rochettes, un bien national confisqué à l'Église lors de la Révolution, et le contrat de mariage de ma grand-mère Julia, à l'origine d'une mésentente familiale qui a perduré pendant des décennies !

Trois articles m'ont permis d'évoquer certaines de mes lectures : le livre qu'Emmanuel Le Roy Ladurie a consacré aux paysans français de l'Ancien Régime, celui d'Anne Sinclair sur son grand-père marchand d'art ou l'Atlas historique des rues de Paris, par exemple.

D'autres billets ont relaté mes expériences personnelles ou souligné quelques mentions insolites collectées au hasard des registres. Et je n'ai même pas pris le temps d'évoquer la cousinade qui a réuni cet été dans le Tarn-et-Garonne les descendants de Jean Fourcade, l'un des frères de ma grand-mère Julia… J'y ai néanmoins consacré un livre de photos, que j'ai réservé aux personnes concernées.


Bref, une année que j'ai vécue de façon intense !

lundi 4 décembre 2017

Une mort par noyade

Je consultais des registres paroissiaux à la recherche de mes ancêtres Laubret, originaires de la Sologne, lorsque je tombai sur les lignes suivantes :

AD 41 Villefranche-sur-Cher 4E280/76 vue 3/11

"Le dix neuvième jour de février de la même année 1755 fut
inhumée (par ordre de monsieur le procureur fiscal de cette
justice instruit de notoriété publique de la folie actuelle
de la personne ci-après) Jeanne Lambert âgée d'environ
trente six ans femme de François Bondeux vigneron la
quelle s'étoit noiée la veille dans la rivière de Cher dans
un accès de folie, la ditte sépulture faite à cinq heures du soir
en présence de Louis Vacher jardinier du château, Gabriel
Chalumeau, Pierre Gaudeschau et autres qui ont déclaré ne
scavoir signer de ce enquis
."

L'acte est signé "Desouches curé de L'Hôpital". Nous sommes dans une paroisse qui figure sur les cartes de Cassini sous le nom de La Commanderie ou de L'Hôpital, aujourd'hui incorporée à la commune de Villefranche-sur-Cher.

Le procureur fiscal, cité dans l'acte, fait partie du personnel exerçant la police et la justice sur le territoire de la seigneurie. Mais pourquoi intervient-il ? Parce qu'il s'agit d'une mort violente et qu'il y a suspicion de suicide. Or, sous l'Ancien Régime, le suicide était considéré comme un péché contre Dieu, interdisant la sépulture en terre chrétienne : pas de cérémonie religieuse ni de cimetière pour les individus coupables de meurtre contre eux-mêmes !

Par ailleurs, la mort n'éteignait pas le crime et une procédure pénale pouvait s'ensuivre. Curieusement, ceux qui avaient raté leur suicide pouvaient être condamnés… à la peine de mort ! Une logique qui m'échappe tout à fait aujourd'hui. Une seule échappatoire, donc : la démence, qui ôte au geste fatal son caractère délibéré, d'où l'insistance du curé sur la folie présumée de la noyée.

J'ai voulu en apprendre davantage sur cette Jeanne Lambert, même si elle ne fait pas partie de mes ancêtres, mais elle n'a guère intéressé les généalogistes. Seuls les relevés effectués par le Cercle généalogique du Loir-et-Cher (relayés par Geneanet) fournissent quelques bribes d'information.

Jeanne Lambert était originaire de La Chapelle-Montmartin, sur la rive gauche du Cher. Elle résidait depuis quelques mois à Saint-Julien-sur-Cher, lorsque, le 9 février 1750, elle épousa dans cette paroisse le sieur François Bondeux. Neuf mois plus tard, elle donnait le jour à une petite Jeanne Elisabeth, dont le sort ne nous est pas davantage connu.


Ma curiosité la sort quelques instants de l'oubli dans lequel elle repose pour l'éternité.

lundi 27 novembre 2017

Cinq ans sans (trop) faiblir !

Eh oui ! Le 26 novembre 2012, j'inaugurais ce blog avec deux premiers billets, l'un pour décrire une addiction naissante à la généalogie et l'autre pour commenter deux photos de mariage de ma grand-mère maternelle.


Je me surprends un peu : toujours fidèle aux rendez-vous du lundi, à part quelques pauses estivales et quelques trêves des confiseurs, il y a cinq ans je n'aurais pas misé un fifrelin sur cette affaire. L'envie de partager l'a sans doute emporté sur une tendance naturelle à repousser l'effort au lendemain !

Et j'en ai tiré mille menus plaisirs. Celui de vous conter les heurs et malheurs de mes ancêtres, de dénicher des mentions insolites dans les registres, de dérouler le fil d'une histoire, de participer à des challenges, de découvrir de nouvelles pistes, de lire vos commentaires…


Donc, je continue. À lundi prochain !

lundi 20 novembre 2017

Le maire s'inquiète des usages

Après avoir largement exploité le registre des délibérations de la municipalité d'Aucun durant la Révolution, je décide de pousser un peu plus loin et de feuilleter les pages suivantes.

Manifestement, les procès-verbaux de toutes les réunions n'ont pas été conservés, puisque le registre saute allègrement de juin 1805 à novembre 1819 et de là à juillet 1821 : nous zappons allègrement la quasi totalité du Premier Empire, ainsi que la Première Restauration, pour retrouver nos Pyrénéens sous le règne de Louis XVIII.

Certains documents ne manquent pas de sel. Devinez, par exemple, ce qui préoccupe le maire lors de la séance du 2 janvier 1822 : les enterrements !

Les citoyens d'Aucun sont confrontés à deux difficultés. La première est d'ordre financier : "Il s'est établi dans cette commune comme dans plusieurs autres, comme un usage dans les mortuaires et les neuvaines(1), d'ouvrir la porte à tous les parents du mort, soit proches, soit éloignés, qu'on est obligé de régaler ; que les dépenses qu'on est obligé de faire sont trop indécentes et ruineuses, pour les laisser subsister".

La seconde est d'ordre pratique : quand il s'agit de porter le corps jusqu'à sa dernière demeure, a contrario on manque de bras !

Le conseil municipal va donc tenter de réglementer. Pour ce faire, il a recours à l'ancienne division de la paroisse en "dizaines" qui correspondent, semble-t-il, à des quartiers : "Deux personnes de chaque maison de la dizaine assisteront au convoi funèbre, les deux plus proches voisins feront, pendant la nuit et indépendamment des proches parents, la garde de la personne morte, les hommes de la dizaine porteront le cadavre à l'église et l'enterreront".

Abords de l'église d'Aucun
Collection personnelle

Mais attention ! Le jour de l'enterrement et le jour de la neuvaine, pas plus de deux proches voisins, en plus des fils et petits-fils de la maison, au repas funèbre : "il est défendu à toute autre personne soit de la commune, soit même étrangère de s'introduire dans la maison du mort pour y boire ou manger" et la consigne vaut également pour les sonneurs de cloches. Ces derniers recevront un franc cinquante centimes pour tout salaire de la part des parents du mort.

Le conseil municipal prévoit même une amende en nature en cas de contravention à ces dispositions : une livre de cire, au profit de l'église, à remettre entre les mains du marguillier.

Voilà, qu'on se le dise !



(1) Cérémonie de commémoration neuf jours après le décès.

lundi 13 novembre 2017

Un douanier chez les Fourcade

Les registres communaux recèlent leur lot de mentions insolites, à l'instar des registres paroissiaux.

C'est ainsi qu'au détour d'une page, entre une délibération sur la vente des biens communaux datée d'août 1804 et une autre sur le pacage des animaux datée de février 1805, le secrétaire de la mairie a recopié le document suivant.

Source AD 65 Aucun
Registre des délibérations 1683-1861 vue 131/292

Douanes Nationales
Direction de Bayonne

_______________________________________
Commission de préposé à la police du commerce
extérieur
_______________________________________

Nous directeur des douanes de la République, à la Résidence
de Bayonne, département des Basses Pyrénées.
En conséquence des pouvoirs à nous donnés par l'administration
des dites douanes, commettons par ces présentes à l'un des
emplois des préposés à la police du commerce extérieur dans cette direction
le citoyen Fourcade (Jean Jacques) né le 25e janvier 1784 à Aucun
département des Hautes Pyrénées taille de 5 pieds 2 pouces, pour après
avoir prêté le serment prescrit, veiller à la conservation des
droits de douane et autres qui ont été ou pourroient être
remis à la dite administration, ainsy qu'à l'exécution des décrets
relatifs aux prohibitions.
En cas de contravantion aux dits décrets, il est autorisé à
rédiger les rapports nécessaires et à les signifier.
Il veillera à la conservation des marchandises naufragées,
et il informera sans délai les employés supérieurs des naufrages
et échouemens qui viendront à sa connoissance.
Il sera toujours muni dans l'exercice de ses fonctions de la
présente commission, qu'il représentera à la première réquisition,
et qu'en cas de démission ou de destitution il sera tenu de
remettre à son contrôleur de brigades.
_____
Fait au Bureau de la direction des douanes à Bayonne
le 1er fructidor an 12e de la République française. Aunis.
_____
Na L'extrait de naissance et le certificat de
bonne conduite sont restés déposés au Bureau de l'adon.
_____
Installé en qualité de préposé
de la sous brigade de Cauterets à
compter du 1er fructidor an 12e
A la charge pour le dénommé ci dessus
de prêter de suite le serment de
fidélité. Derois.

Il s'agit, sans aucun doute possible, de l'un des fils de mon ancêtre Alexis Fourcade. Ce Jean Jacques Fourcade fut donc nommé douanier le 19 août 1804, alors qu'il avait vingt ans. J'apprends au passage qu'il mesurait environ 1,57 m : petite taille de montagnard, donc.

Je ne sais trop pourquoi l'administration parle de naufrages et d'échouements : Cauterets est une station thermale des Hautes-Pyrénées, située à 900 mètres d'altitude, et je doute fort que le gave qui la traverse soit navigable. Nous sommes en outre à plus de 180 km de Bayonne. Mais à Cauterets, la proximité de l'Espagne devait largement inspirer les contrebandiers…

Contrebandier des Pyrénées
Médiathèque intercommunale de Bagnères-de-Bigorre
via Gallica

Toutefois, la carrière de gabelou de Jean Jacques Fourcade fut sans doute de courte durée, car, lorsqu'il épouse Jeanne Marie Garcie à Aucun, en octobre 1813, il est qualifié de laboureur. Le couple donnera par la suite le jour à une douzaine de petits Fourcade, six garçons et six filles, tous nés dans ce village du val d'Azun qui m'a intéressée ces derniers mois.

Jean Jacques Fourcade décèdera cinq ans après son épouse, à l'âge de quatre-vingt quatre ans, le 30 mars 1868 dans la maison Ors.

lundi 6 novembre 2017

Enterré sans cérémonie

Ayant très provisoirement délaissé mes recherches de généalogiste amateur pour endosser pendant quelques jours le rôle de grand-mère polyvalente, je vous propose aujourd'hui cette simple mention insolite, découverte au détour d'une page.

Nous sommes à Brain-sur-Longuenée, dans l'actuel département du Maine-et-Loire. L'indication dans la marge a attiré mon regard : "S de Jean Marion impie et athée".

AD 49 Brain-sur-Longuenée
Collection communale vue 5/89

"Le treze may mil sept cent trente trois Jean Marion
agé de soixante ans ou environ, domestique à la
métairie de la Faucherie a été trouvé mort en son lit, et par
ordre de Monseigneur de Vaugirault évêque d'Angers led(it) Marion
a été enterré au bas du grand cimetière sans aucune cérémonie de
l'église et sans aucuns suffrages dans l'église, sans sonner les cloches parce qu'il n'avait point fait de pâques depuis
vingt ans et qu'il vivait en athée et impie, et nous Curé sousigné avons
asisté comme témoin à cette sépulture. J. Bellanger Curé de Brain
"


L'acte figure dans le registre de la collection communale et le scripteur n'a pas jugé utile de le recopier dans le registre de la collection départementale. On ne plaisantait pas avec la pratique religieuse, à l'époque !