Je travaillais récemment sur le couple formé par François Le
Manceau et Claude Richard, deux de mes ancêtres à la dixième génération du côté
de ma grand-mère paternelle. Tous deux sont originaires de la paroisse de Bazouges,
aujourd'hui rattachée à Château-Gontier, au sud de l'actuel département de la
Mayenne.
Nouvelle immersion dans les archives numérisées de ce
département, qui figurent parmi les plus anciennes en ligne, les plus riches et
les plus aisées à consulter. Un pur plaisir… et parfois quelques surprises,
mais n'allons pas trop vite.
François Le Manceau fut porté sur les fonts baptismaux le
28 décembre 1652, alors que Louis XIV n'avait que quatorze ans. L'acte de
baptême, à demi effacé, est un joli défi pour les paléographes amateurs :
bref, je suis incapable de vous dire qui furent parrain et marraine !
Source AD Mayenne Bazouges Baptêmes 1641-1661 vue 100/182 |
Marié une première fois à vingt-deux ans et devenu veuf, François
se remarie à trente-et-un ans, en août 1684, avec Claude Richard, une jeunette
de vingt ans si j'en crois les allégations du prêtre (ce dernier beaucoup plus
lisible que l'officiant précédent).
Mariage prolifique, selon la coutume de l'époque : au
moins neuf enfants voient le jour entre avril 1686 et mars 1707, sept garçons
et deux filles. Le père est qualifié de bourgeois dans l'un des actes de
baptême ; autrement exprimé, il réside dans le bourg proprement dit, et
non pas dans l'une des fermes disséminées dans la campagne alentour. Il semble
qu'il ait exercé la profession d'huilier (huile de lin à l'époque, je suppose)
et peut-être aussi celle de voiturier. Lorsqu'il meurt en mars 1708, sa veuve
se remarie quatre mois plus tard. Tiens, le délai de viduité n'existait pas
sous l'Ancien Régime ? À ce détail près, jusqu'ici rien que de très banal,
en somme.
Penchons-nous maintenant sur les enfants du couple. Le fils
aîné, prénommé François lui aussi, se marie à la toute fin du règne du
Roi-Soleil, en février 1713. Il a vingt-six ans et il épouse une certaine
Jeanne Lanier, déjà veuve de François Ardouin ou Hardouin, selon les scripteurs.
Source AD Mayenne Bazouges BMS 1703-1719 vue 178/265 |
Et c'est là que je découvre ce paragraphe dans l'acte de
mariage : "Jeanne Lanier veuve de François Ardouin ainsi qu'il nous
est aparu (sic) par le certificat de l'extrait du registre général des
chiourmes des galères de la ? signé François Rozel coner du roy
commissaire ordonnateur de la marine et des galères à Marseille le 13e
octobre 1712". Un mot m'échappe, mais le reste de la phrase ne fait
aucun doute.
Peste ! Pour ceux qui l'ignoreraient (moi, jusqu'à
présent), le mot chiourme vient de
l'italien ciurma et désigne l'équipe
de rameurs d'une galère, dixit le Petit Larousse illustré. Mon premier
galérien !
Un détour par le Dictionnaire de l'Ancien Régime nous
apprend qu'il en existait trois catégories : les volontaires (en voie de
disparition, on se demande pourquoi), les esclaves originaires de l'Empire
ottoman et les forçats. Ces derniers provenaient des geôles du royaume et
étaient convoyés enchaînés jusqu'à Marseille. Marqués au fer rouge des lettres
GAL sur l'épaule droite.
Pour la période qui nous intéresse, entre 1680 et 1715, ces
forçats étaient constitués pour une petite moitié de soldats déserteurs, pour
un tiers de prisonniers de droit commun, pour plus de 15 % de
faux-sauniers et pour 4 % de protestants (après la Révocation de l'Edit de
Nantes). Plus de 38 000 furent envoyés à Marseille, plus de la moitié
mourut à la peine…
Galères par Pierre Puget vers 1665 Source Wikimedia Commons |
J'ignore à quelle catégorie rattacher François Ardouin. Et une
autre question subsiste : quelqu'un sait où ces registres des chiourmes peuvent
être consultés ?
Intéressante découverte !
RépondreSupprimerSelon le livre "Vos ancêtres à travers les archives militaires", les registres matriculaires des galères de Marseille sont conservés par le SHD à Toulon (périodes 1670-1674 et 1682-1748).
J'espère que tu pourras trouver des informations à son sujet, et nous raconter tout ça !
Elise
Tu as raison. Je suis allée acheter ce livre le mois dernier, directement au SHD de Vincennes puisque j'habite à proximité, et je n'ai pas eu le réflexe de le consulter ! Merci pour le tuyau. Un seul hic : quand irai-je à Toulon ? Il va falloir faire appel à un ou une bénévole…
SupprimerVraiment excitant !
RépondreSupprimer(Pour le mot pas trouvé je crois que c'est "des galères de sa majesté",pas très important donc).
Bien sûr ! Dans un premier temps, j'avais lu "la maiene", ce qui me paraissait invraisemblable, et je n'avais pas pensé à "sa majesté". Merci d'avoir éclairé ma lanterne.
SupprimerBelle piste à explorer. Dans un premier temps, ce qui m'amuse c'est de voir ce patronyme HARDOUIN à Bazouges, dans la périphérie des ancêtres HARDOUIN de Rosita. Encore un cousinage? Une bonne piste pour lui donner l'envie de plonger dans la marmite des ancêtres ! Dés qu'elle prendra sa retraite.... encore remise de 3 mois.
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