Les recherches sur un ancêtre commencent par la collecte des
actes qui jalonnent sa vie civile : naissance, mariage(s), décès. Le plus
intéressant d'un point de vue généalogique est sans conteste l'acte de mariage,
notamment lorsqu'il a été rédigé au XIXe siècle, car il fournit à
lui seul un lot considérable d'informations : identité, âge et domicile
des mariés, de leurs parents respectifs, des quatre témoins…
Comment faire si cet acte est introuvable ?
Quand j'ai entamé la généalogie de mes ancêtres, la question
s'est un jour posée. L'un de mes arrière-grands-pères, Frédéric Chancé, a
épousé à Paris en novembre 1861 une certaine Madeleine Augustine Laubret. Il
était peintre en bâtiment, elle était crémière et tous deux habitaient sur la
butte Montmartre, au n°18 de la rue Feutrier.
L'acte de mariage indiquait que Madeleine Augustine Laubret,
fille de Madeleine Laubret, était née à Salbris le 14 décembre 1835.
J'allais donc jeter un coup d'œil du côté de la Sologne.
À l'époque de ces recherches, les archives départementales
du Loir-et-Cher n'étaient pas accessibles en ligne. Je décidai donc de passer
par l'entraide de FranceGenWeb, service remarquablement efficace qui s'appuie
sur un réseau de bénévoles. J'avais déjà eu affaire à eux et j'avais pu
constater que ces derniers vous fournissent dans un délai raisonnable les
documents recherchés, pourvu que la demande soit suffisamment précise.
Un mois plus tard, je recevais l'image de l'acte de naissance.
J'ouvris le fichier avec une certaine excitation. J'allais enfin pouvoir
prolonger cette branche de mon arbre, y rattacher quelques nouveaux ancêtres,
remonter le temps d'une génération ou deux… Patatras ! Madeleine Augustine
était bien la fille de Madeleine Laubret, çà je le savais déjà, mais elle était
née de père inconnu !(1) Le
déclarant était un certain Etienne Laubret, 50 ans, peut-être le grand-père de
l'enfant, mais rien ne permettait de l'affirmer.
Les informations sur la mère étaient succinctes :
"fille non mariée domestique, demeurant aux Houx dite commune de
Salbris". Sans acte de mariage, comment savoir son âge, l'identité de ses
parents ? où chercher son acte de naissance ? comment être sûre de ne
pas faire fausse route, à partir d'une homonymie trompeuse ?
Je passai à une autre branche, en attendant des jours
meilleurs.
Bonne nouvelle, les archives du Loir-et-Cher sont
accessibles depuis fin 2011. J'ai néanmoins attendu encore quelques
semaines. J'ai en effet appris à éviter de consulter les archives numérisées
dès l'annonce de leur mise en ligne. Vous avez déjà vu les magasins le premier
jour des soldes ? la foule qui piétine devant les portes en attendant
l'ouverture et les petits malins qui se précipitent avant même que les grilles
soient complètement levées pour être les premiers sur l'article tant
convoité ? Eh bien, les archives numérisées, c'est pareil. Les serveurs
sont submergés et toutes les demandes ne peuvent être satisfaites. Vous restez
devant votre écran à regarder la petite roue qui tourne, qui tourne… et rien ne
s'affiche. Frustrant !
Par une après-midi pluvieuse, je me décidai enfin à remonter
la piste de cette Madeleine Laubret. La fille était née en 1835, la mère
habitait peut-être encore Salbris en 1841, date du premier recensement
disponible en ligne.
Quoi ? 453 pages pour 1676 habitants ?
"Ils" en mettent combien par page ?(2) J'attaquais bravement la lecture, sans être sûre de tenir bien longtemps, mais
la chance m'a souri. Page 6, le cinquantième ménage répertorié dans la
Grande Rue (les maisons ne semblent pas numérotées) attira mon attention :
il était composé de Pierre Joulin, journalier, de Madeleine Laubret, femme
Joulin, sa femme, et de Madeleine Augustine Laubret, sa fille naturelle. Notez
au passage l'ambiguïté de l'adjectif possessif.
Source : Archives départementales du Loir-et-Cher |
Je n'avais plus qu'à me reporter aux tables décennales, en
espérant que le couple avait convolé à Salbris. Bingo ! L'acte de mariage
avait été rédigé le 10 septembre 1839 et comportait la filiation des deux
époux. Il m'a permis de confirmer qu'Etienne Laubret était le grand-père de
Madeleine Augustine. Mais pas de légitimation de l'enfant dans l'acte de
mariage, Pierre Joulin n'est donc vraisemblablement pas le père.
J'avais néanmoins renoué le fil, grâce aux listes de recensement.
J'ai maintenant identifié les ancêtres de Madeleine Augustine sur trois
générations à partir de son grand-père Etienne Laubret et sur quatre
générations à partir de sa grand-mère Marguerite Bernard. Mes racines
s'enfoncent de plus en plus profondément dans le terroir…
(1) J'aurais dû
m'en douter, car il n'était pas mentionné dans l'acte de mariage.
(2) Le registre
contient en réalité les douze recensements effectués de 1841 à 1896.
Bravo Dominique, quel plaisir de te lire.
RépondreSupprimerJe suis moi aussi une grande adepte des recensements quand on a la chance de les avoir, on en apprend tellement plus sur la famille. J'ai ainsi pu suivre la trace de mon arrière grand père qui commença à travailler comme domestique dès 12 ans, tout de suite après le décès de son père. Le voir ainsi passer au fil des rencensements dans différentes métairies avant de se fixer, ca m'a apporté bien plus que les simples mentions dans les actes. Et c'est tout un village qu'on voit vivre à travers un recensement, j'adore ca
Je rejoins votre article sur l'intérêt certain des recensements.
RépondreSupprimerIls peuvent jouer un rôle important dans le déblocage d'une branche.
En plus de ça, ils permettent de connaître la composition du ménage (descendance) voire ascendance (notamment si grand-parents vivent avec les enfants), les métiers, l'adresse...
Comme je le disais il n'y a pas si longtemps, c'est ce qui pimente les recherches généalogiques :-)
J'ajoute votre blog dans ma liste de favoris sur mon blog mesracinesfamiliales.blogspot.fr
Tout à fait d’accord avec l’utilité de l’outil des listes de recensement.
SupprimerUne seule difficulté mais d’importance comme évoqué dans le témoignage :
Le cas où nous ne disposons pas d’une adresse précise notamment dans les grandes villes…