lundi 3 septembre 2018

Deux photos

Sur la première, un cortège composé de civils et de militaires marche au milieu de la chaussée, entre deux haies de spectateurs, laissant derrière lui un pont et s'apprêtant à passer devant un bâtiment sur lequel je distingue le mot "Postes". C'est sans doute la belle saison : les spectatrices arborent des tenues claires et j'aperçois au moins un canotier. Vu la longueur des jupes et les chapeaux-cloches qui enserrent la tête des femmes, je dirais que nous sommes dans cette période de la Troisième République qui fut surnommée les Années folles.

Collection personnelle

Sur la deuxième photo, un petit groupe d'hommes se tient debout dans un jardin public, au pied d'un monument aux morts où une gerbe de fleurs a été déposée. Dans la foule qui fait cercle autour d'eux, je distingue une fanfare, des militaires au garde-à-vous, des drapeaux, des hommes en redingote tête nue, quelques costumes clairs et quelques canotiers…

Collection personnelle

Le verso m'en apprend davantage. Toutes deux portent un tampon : "L'Actualité", Jové, photographe, 46, rue du Maréchal Joffre, Pau(1). Et cette précieuse indication manuscrite : Doumergue Président de la République française, Gabe maire, papa adjoint, ainsi qu'une signature, celle d'une de mes tantes, Jacqueline Maitreau, dont je reconnais l'écriture.

Collection personnelle

Précieux indices qui me permettent d'abord de situer la scène. Amédée Gabe a été maire d'Oloron-Sainte-Marie après la guerre de 1914-1918, de novembre 1919 jusqu'à son décès en octobre 1932. Un petit tour sur internet, histoire de vérifier que ce monument aux morts en forme de colonne, dont on distingue surtout le socle, le reste se perdant dans les frondaisons, est bien celui de la sous-préfecture des Pyrénées-Atlantiques.

Gaston Doumergue, quant à lui, a été Président de la République de 1924 à 1931, ce qui permet d'affiner la datation de l'événement. Je pencherais pour le mois de juillet 1928. Pourquoi, me direz-vous ? Eh bien, précisément le 18 juillet de cette année-là, le Président de la République Gaston Doumergue et le roi d'Espagne Alphonse XIII inauguraient la gare internationale de Canfranc(2) ; laquelle est située à la frontière entre la France et l'Espagne, à une soixantaine de kilomètres au sud d'Oloron, sur la ligne de chemin de fer qui reliait Pau à Saragosse, en passant par le tunnel du Somport.

De là à penser que le Président de l'époque en a profité pour rendre visite à la cité béarnaise il n'y a qu'un pas que je franchis allégrement. Il faudrait néanmoins vérifier en consultant la presse locale…

Conclusion : mon grand-père maternel Maurice Maitreau, dont je crois reconnaître la silhouette sur la première photo, a donc fait partie du conseil municipal d'Oloron-Sainte-Marie durant l'entre-deux-guerres. J'ai profité d'une escapade dans le sud-ouest pour tenter d'en apprendre davantage… rendez-vous lundi prochain pour connaître la suite !





(1) Jean Jové (1876-1957), photographe d'origine espagnole, naturalisé français en 1931, installé successivement à Epinal, à Châteauroux, à Limoges, puis à Pau à partir de 1920 (source Wikipédia).

(2) Deuxième plus grande gare d'Europe par la taille de ses installations, après celle de Leipzig, mais aujourd'hui désaffectée, après de multiples vicissitudes (crise de 1929, incendie en 1931, guerre civile espagnole…).

1 commentaire:

  1. Jean JOVE fut durant de nombreuses années le photographe "attitré" de mon père,le peintre René Marie CASTAING, Grand Prix de Rome de Peinture 1924, qui appréciait énormément la qualité artistique de son travail et la valeur de ses critiques ainsi d'ailleurs que celles de son épouse, qui après la mort de l'artiste publia un très belle article dans le"PATRIOTE des PYRENEES"

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