J'aime bien, je vous l'ai déjà expliqué par ailleurs(1),
compléter les fratries de mes ancêtres. J'entends par là établir la liste de
tous les frères et sœurs et, pour chacun d'eux, trouver au moins les dates et
les lieux des trois événements majeurs qui les concernent, naissance et/ou
baptême, mariage, décès et/ou sépulture.
Cela ne présente en principe guère de difficulté, si les
registres ne sont pas lacunaires ou trop endommagés, lorsque les personnes en
question sont d'origine paysanne et qu'elles ne s'éloignent pas outre mesure de
leur village d'origine. Mais au XIXe siècle, la société évolue, la
migration des campagnes vers les villes s'intensifie et les recherches se
compliquent.
Prenons le couple formé par Louis Martin Chancé et Anne
Restaux, mes ancêtres à la cinquième génération. Ils se sont mariés civilement
le 20 février 1815, à quatre heures du soir, à la mairie de Touchet (on ne
disait pas encore Notre-Dame-du-Touchet), dans le sud du département de la
Manche. Le jeune homme n'a que dix-huit ans et je le soupçonne de tenter
d'échapper ainsi à une possible conscription, d'autant que le mariage religieux
n'est célébré que onze mois plus tard dans la même paroisse.
Intérieur de l'église Notre-Dame-du-touchet Collection personnelle |
Le premier enfant du couple, Fannie Anne, voit le jour neuf
mois après le mariage religieux. Un indice de plus ? Peut-être. Puis viendront encore
deux filles et quatre garçons, dont le dernier, né en 1834, Frédéric François
Louis, est mon arrière-grand-père. Un seul enfant, la petite Marie Jeanne née
en décembre 1823, décède à l'âge de seize mois. Les autres atteignent l'âge
adulte.
Deux d'entre eux ne quittent pas le bocage. Fannie Anne se
marie dans la commune voisine de Villechien et sera toute sa vie cultivatrice.
Louis Victor décède à Buais à l'âge de vingt-deux ans, je n'en sais pas plus à
son sujet pour le moment. Les trois autres garçons migrent vers la capitale
pour y exercer le métier de peintre en bâtiments. Ils y feront souche.
Seule Anne Louise Jacqueline, née en septembre 1817 un an
après sa sœur aînée, me posait problème. À l'âge de quatorze ans, elle porte
son jeune frère Louis Victor sur les fonts baptismaux, puis… plus rien. Ah si,
tout de même, j'apprends par FamilySearch qu'elle aurait épousé en juillet 1841
à Villechien un certain Charles Pierre Lechevrel. Las, les registres
paroissiaux du diocèse d'Avranches pour le XIXe siècle ne sont
désormais plus consultables en ligne.
Qu'à cela ne tienne, qui dit mariage religieux, dit mariage
civil préalable. Je consulte donc les tables décennales de Villechien, puis
celles de Notre-Dame-du-Touchet et celles de Buais au cas où… malheureusement
sans succès. Et je passe provisoirement à autre chose.
Le mois dernier, je décide de faire une énième tentative par
le biais de Geneanet et là, bingo ! Quelqu'un mentionne dans son arbre le
décès d'une certaine Anne Louise Jacqueline Chance (oui, je sais, j'ai
l'habitude, tout le monde ne repère pas l'accent aigu sur le e final) au
Grand-Quevilly, dans la banlieue rouennaise, en 1863. Et indique, sans plus de
précision, un mariage à Sainte-Anne de Buais avec Charles Pierre Lechevrel.
L'occasion de découvrir les archives en ligne de la
Seine-Maritime. L'acte de décès indique la filiation : pas de doute, c'est
bien elle.
Précisons que la commune de Sainte-Anne de Buais n'existe
pas, mais que l'église paroissiale de Buais est bien dédiée à Sainte-Anne.
Retour vers les tables décennales, donc, sans plus de succès que la fois
précédente. Et si j'essayais les publications de bans regroupées en fin de
registre ? Yes ! le 14 et le 21 février 1841, le maire annonce
qu'il y a promesse de mariage entre Charles Pierre Lechevrel, domicilié au
Teilleul, et Anne Louise Jacqueline Chancé, domiciliée dans la commune de
Buais. Ouf ! il ne me reste plus qu'à feuilleter le registre des mariages de
l'année 1841 pour y trouver l'acte à la date du 2 mars. Enfer et
damnation ! Les tables décennales étaient incomplètes !
Source Heredis 2015 |
Un premier enfant naît l'année suivante au Teilleul. Le père
est encore qualifié de laboureur. Je perds ensuite la trace du couple pendant
une petite dizaine d'années, jusqu'à sa réapparition à deux cents kilomètres de
là, dans les environs de Rouen, avec la naissance de trois autres garçons :
le premier au Petit-Quevilly, les deux autres à Petit-Couronne. Le père est successivement
"ouvrier de fabrique", "journalier", puis "journalier
et cultivateur" au fil des déménagements successifs, jusqu'au décès de son
épouse au Grand-Quevilly, à l'âge de quarante-six ans. Je suppose que leur vie
n'a pas dû être rose tous les jours…
Quoi qu'il en soit, la persévérance a payé et je remercie au
passage la personne qui m'a mis sur la trace de cette branche collatérale.
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