Nouvelle incursion dans les
registres paroissiaux de la Mayenne ces jours-ci, grâce à l'alerte hebdomadaire
qui me met sur la piste du couple formé par Jean Hallé et Benoîte Turcan. Des
ancêtres à la douzième génération du côté de ma grand-mère paternelle.
Après avoir collecté une vingtaine
d'actes et entré les informations dans ma base de données, je fais le point sur
l'état de mes recherches.
Jean Hallé est sans doute né en
mai 1624 à Chantrigné. Nous sommes au nord de l'actuel département de la
Mayenne, dans l'ancienne province du Maine, à la limite de la Normandie et à
quelques lieues au sud de la forêt d'Andaine. Son épouse, Benoîte Turcan, a vu
le jour vers 1627, peut-être à Niort-la-Fontaine où les Turcan semblent avoir
fait souche, mais j'y ai cherché en vain son acte de baptême.
Impossible également de mettre la
main sur l'acte de mariage du couple : rien à Chantrigné, où les registres
sont remarquablement lisibles, ni rien non plus à Niort-la-Fontaine, où il
manque les registres de mariages des années 1642 à 1650, pile la période qui
m'intéresse.
Extrait de la carte générale de la France, feuille 96, établie sous la direction de C. F. Cassini de Thury Source Gallica |
Le couple a donné le jour à neuf
enfants au moins, cinq garçons et quatre filles, entre novembre 1647 et avril
1668. Les cinq premiers sont nés à Niort-la-Fontaine de 1647 à 1655, puis à
partir de 1662 trois autres sont venus au monde à Chantrigné. Cela fait huit,
me direz-vous. J'ai identifié le neuvième uniquement par son acte de sépulture,
à Chantrigné en 1664 : pas d'ambiguïté, le nom des parents est clairement
indiqué, mais l'âge de l'enfant n'est pas précisé, et je n'ai trouvé trace
du baptême ni à Chantrigné, ni à Niort-la-Fontaine. Peut-être, a-t-il vu le
jour entre 1656 et 1661, ce six longues années sans naissance pour le couple,
mais où ?
Passons maintenant au chapitre des
sépultures. Nous sommes toujours à Chantrigné, précisément en avril 1681, et là
surviennent coup sur coup trois décès dans la famille Hallé, en l'espace de dix
jours. C'est Perrine, l'une des filles du couple, qui est d'abord portée en
terre le 1er avril, à trente-deux ans. Elle avait accouché d'un
garçon dans les jours qui précédaient, ce qui pourrait bien être la cause de sa
mort prématurée.
Le 4 avril, c'est au tour de Benoîte
Turcan d'être enterrée, à 54 ans ou environ, comme nous le dit l'acte de
sépulture. Puis le 10 avril, c'est Jean Hallé qui rend l'âme ; il
avait 56 ans. Chronique de la vie ordinaire dans les campagnes au temps de
Louis XIV… sauf que les pages du registre attirent soudain mon regard par le
nombre d'actes de sépulture qui y figurent : trente-deux, rien que pour
le mois d'avril ! Des personnes jeunes pour la plupart, quinze, vingt ans,
trente ou trente-cinq ans…
Je tourne les pages : 3
inhumations en janvier, 7 en février, 10 en mars, puis après le pic d'avril, le
nombre des enterrements diminue, 11 en mai, 6 en juin, 7 en juillet et 3 par
mois d'août à décembre. Alors, une épidémie ?
Malheureusement, Louis Bottu, curé
de Chantrigné et doyen de Lassay, est peu prolixe. Aucune mention particulière
dans le registre, sauf cette statistique laconique à la fin de l'année :
"91 sépultures,
11 mariages, 51 baptêmes". Annotation dont il n'était d'ailleurs
pas coutumier, ce qui tendrait à prouver le caractère exceptionnel de cette
année 1681 pour sa paroisse.
Le quatrième cavalier de l'Apocalypse, gravure de Gustave Doré Source Wikimedia Commons |
J'ai cherché à savoir si l'année
avait été particulièrement néfaste pour d'autres sujets du royaume de France,
mais je n'ai trouvé rien de notable. L'emploi du terme épidémie(1)
est d'ailleurs inapproprié, si j'en juge par la définition donnée par le Petit
Larousse illustré : "propagation
subite et rapide d'une maladie infectieuse, par contagion, à un grand nombre de
personnes d'une région". Manifestement, nous ne sommes pas dans ce cas
de figure à Chantrigné, un coup d'œil aux registres des paroisses voisines
suffirait pour nous en convaincre. Simplement un épisode funeste, dont j'ignore
les causes, puis la vie a repris son cours.
(1) Voir également à ce sujet l'entrée Épidémies
dans le Dictionnaire de l'Ancien Régime,
sous la direction de Lucien Bély, aux Presses universitaires de France
Très intéressant. Parfois, ces «épidémies» locales étaient dues à des maladies infantiles, comme la picotte ou varicelle, qui sont bénignes chez l'enfant mais peuvent devenir mortelles chez l'adulte non immunisé.
RépondreSupprimerOui, je n'y avais pas pensé, mais vous avez sûrement raison.
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